Membres du projet
Projet
Le cancer colorectal (CRC) et le carcinome hépatocellulaire (CHC) représentent les deux principales causes de décès parmi les cancers solides de la sphère gastro-intestinale. Ces dernières années, la chimiothérapie ou les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire (ICI) ont révolutionné la prise en charge thérapeutique des patients atteints de CRC et de CHC avancés. Toutefois, moins de la moitié de ces patients répond de façon durable à ces traitements en raison de mécanismes de résistance primaires ou adaptatifs. Des altérations du métabolisme énergétique, au sein des cellules cancéreuses et immunitaires, sont souvent associés à ces mécanismes de résistance.
L’activité de notre équipe vise ainsi à comprendre les mécanismes par lesquels les altérations du métabolisme énergétique au sein de la tumeur contribuent à la progression du CRC et du CHC, à l’échappement du contrôle immunitaire et à la résistance aux traitements dans des modèles précliniques. Grâce aux collaborations entre les chercheurs et les cliniciens de l’institut Cochin, notre ambition est de transférer nos découvertes fondamentales à la clinique dans le but d’identifier de nouveaux biomarqueurs permettant de proposer des traitements adaptés aux patients et de pouvoir identifier de nouvelles stratégies thérapeutiques.
Notre équipe réunit une expertise unique et des outils issus de la recherche fondamentale et clinique pour caractériser les mécanismes moléculaires des réponses adaptatives des cellules cancéreuses aux thérapies. Au travers d'approches complémentaires comme la métabolomique, les techniques de profilages isotopiques, la transcriptomique, la culture 3D d’organoïdes et le développement de modèles mathématiques, nous caractérisons la nature des réseaux métaboliques dérégulés dans le cancer afin de déterminer si leur ciblage pharmacologique peut contribuer au développement de nouvelles stratégies de traitement.
Malgré les avancées extraordinaires réalisées au cours de ces dernières années pour traiter le cancer, il n’existe toujours pas d’approche globale permettant de prévenir le développement et la récurrence des cancers de tous genres. La mission de notre équipe au sein de l’Institut Cochin est de mieux comprendre les mécanismes moléculaires et cellulaires sous-jacents à plusieurs cancers, dans l’espoir que ces connaissances mèneront au développement de nouvelles approches thérapeutiques tant attendues. Nos recherches contribuent ainsi particulièrement à la lutte contre deux cancers répandus et de mauvais pronostics, le cancer colorectal (CRC) et le carcinome hépatocellulaire (CHC).
Notre équipe peut apporter son expertise dans la caractérisation des différentes composantes du métabolisme cellulaire.
Cibles
- Voie de la glycolyse
- Métabolisme mitochondrial
- Voie des acides aminés
- Voie de synthèse et d’utilisation des lipides
Technologies Innovantes
- Métabolomique et profilage isotopique (13C) et flux métabolique (14C)
- Caractérisation du métabolisme cellulaire (Seahorse, mesure de la respiration cellulaire (OROBOROS), dosage d’activité enzymatique et du statut redox…)
- Développement d’organoïdes de CRC et de CHC
- Développement de nouveaux modèles génétiques de CRC et CHC
- Crible génétique (CRISPR/CAS9) et pharmacologique
Projets en cours
Axe 1 : Reprogrammation métabolique et cancer
- Cancer Colorectal (CRC)
Cette étude vise à identifier les meilleures stratégies pour prévenir le développement du cancer colorectal. Notre principal objectif est de déterminer si le ciblage du métabolisme énergétique de la tumeur représente une nouvelle perspective thérapeutique pour les traitements anti-cancéreux. L'équipe étudie ainsi comment la reprogrammation du métabolisme oxydatif de la cellule cancéreuse participe au développement du CRC, en s’intéressant à la fonction de la protéine mitochondriale UCP2 (uncoupling protein 2) et ce vis-à-vis de la réponse immunitaire, la prolifération cellulaire et les processus de la carcinogenèse colique. Notre équipe a montré qu’UCP2 participe à la reprogrammation du métabolisme cellulaire, y compris l'oxydation du glucose et des acides gras, dans divers modèles cellulaires. Nous avons démontré que les cellules cancéreuses sur-exprimant UCP2 changent leur métabolisme de la glycolyse vers la phosphorylation oxydative et deviennent peu tumorigènes (Esteves et al., 2014). Sa perte globale favorise le développement tumoral dans des modèles murins de CRC (Aguilar et al., 2019). Ainsi la reprogrammation métabolique induite par la perte d’UCP2 augmente le stress oxydant en favorisant le développement du CRC. Nous étudions également comment cette modulation métabolique peut également réguler la réponse immunitaire. Ainsi, UCP2 apparaît comme une excellente cible pour lier métabolisme, équilibre redox et réponse immunitaire, qui sont intimement impliqués dans le développement du CRC.
- Carcinome Hépatocellulaire (CHC)
Chez l'homme, l’initiation et le développement d'un CHC est particulièrement corrélée à l'augmentation du nombre de patients atteints du syndrome métabolique (obésité, diabète, stéatose hépatique). En raison de son rôle central dans le contrôle du métabolisme des glucides et des lipides dans le foie, nous avons émis l'hypothèse que le facteur de transcription sensible au glucose ChREBP (Carbohydrate Responsive Element Binding Protein), jouant un rôle clé dans la régulation du métabolisme des lipides dans le foie, pourrait jouer un rôle clé dans les étapes d’initiation et de développement du CHC. Nous montrons chez la souris pour la première fois qu'une augmentation de l'activité transactivatrice de ChREBP dans l'hépatocyte est suffisante à elle seule pour initier le développement d'un CHC de mauvais pronostic (Benichou et al., en révision). D'un point de vue moléculaire, ChREBP exerce ses effets pro-prolifératifs et pro-oncogéniques sur l’hépatocyte en stimulant l'activité de la voie de signalisation PI3K/AKT. De plus, l’augmentation de l’activité de ChREBP favorise la réorientation du métabolisme du glucose et de la glutamine vers des voies anaboliques de synthèse de novo de lipides et de nucléotides nécessaires à la prolifération des cellules tumorales. Au vu de nos résultats, ChREBP constitue une cible thérapeutique de choix pour le développement de nouvelles stratégies de traitement du CHC.
Axe 2 : Métabolisme et Immunité tumorale
Au cours des deux dernières décennies, les avancées en onco-immunologie ont conduit au développement de diverses formes d’immunothérapies qui mobilisent le système immunitaire pour promouvoir ou restaurer une réponse immunitaire anti-tumorale efficace. S’il est en effet bien admis que le système immunitaire joue un rôle essentiel dans la surveillance de l’émergence des cellules malignes (concept d’immunosurveillance), ses fonctions immunosuppressives et sa contribution au processus de tumorigenèse associées à la progression de la maladie et à la résistance aux traitements demeurent moins bien définies. Bien que des améliorations sans précédent dans le contrôle des tumeurs aient été obtenues avec des anticorps monoclonaux thérapeutiques qui libèrent des points de contrôle inhibiteurs du système immunitaire, comme les anticorps bloquants l’axe PD-1/PD-L1, il est maintenant évident que seule une minorité de patients recevant ce type d’immunothérapie répondent au traitement, et que la résistance naturelle ou acquise à ces inhibiteurs est courante. De nombreux efforts sont donc actuellement déployés pour identifier de nouvelles cibles qui activent, déclenchent ou améliorent les réponses immunitaires anti-tumorales.
Dans ce contexte, une meilleure compréhension des relations existant entre le métabolisme énergétique, les cellules cancéreuses et les cellules du système immunitaire est essentielle afin d’optimiser les traitements actuels. Par une analyse approfondie du microenvironnement tumoral, notre équipe en étroite collaboration avec des cliniciens, s’attache à déchiffrer les mécanismes moléculaires et cellulaires immunosuppresseurs qui contribuent à l'échappement des tumeurs à la surveillance par le système immunitaire. Notre équipe s’intéresse ainsi en particulier au rôle du métabolisme dans les lymphocytes et macrophages dans le contexte du développement tumoral et des traitements anti-cancéreux.
Dans les CRC et CHC, nos projets visent à :
- caractériser le microenvironnement immunitaire tumoral associé à la progression tumorale et la résistance aux traitements
- identifier de nouvelles stratégies métaboliques basées sur le blocage des mécanismes immunosuppresseurs qui contribuent à l’échappement des cellules tumorales à la surveillance immunitaire
- apporter la preuve de concept de ces stratégies thérapeutiques nouvelles dans des modèles précliniques et cliniques.
Nos objectifs à terme sont d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques et d’apporter la preuve du concept de nouvelles stratégies dites métaboliques pour améliorer la réponse aux traitements d’immunothérapie.