Thèse préparée sous la direction de madame la professeure Asmaa TAZI, équipe Pathogenèse bactérienne et signalisation immunitaire innée
Résumé :
Streptococcus agalactiae (streptocoque du groupe B, SGB) est une bactérie commensale du tractus digestif et génito-urinaire chez l’humain mais également une cause majeure d’infections néonatales invasives. En France, le complexe clonal 17 (CC17), particulièrement impliqué dans les infections tardives (survenant entre 7 à 89 jours de vie), est en expansion et suscite des préoccupations croissantes en raison de l’émergence de souches résistantes aux antibiotiques. Cette thèse s’est intéressée à la fois à l’évolution épidémiologique de ces infections et aux mécanismes moléculaires par lesquels le SGB interagit avec l’hôte, en particulier au niveau intestinal.
Nous avons d’abord exploré l’évolution des infections néonatales à SGB autour de trois études complémentaires qui ont permis d’éclairer différents aspects épidémiologique de cette pathologie. La première révèle la diffusion rapide de clones épidémiques de SGB CC17 en milieu hospitalier, malgré les mesures de prévention existantes, et souligne la vulnérabilité des nouveau-nés prématurés. La deuxième met en évidence la fréquence non négligeable des infections récidivantes à SGB, souvent associées au SGB CC17, et interroge les mécanismes de persistance bactérienne. Enfin, la troisième décrit l’évolution de l’antibiorésistance du SGB entre 2007 et 2024 et l’émergence, depuis 2016, d’un clone de SGB ST1010, phylogénétiquement proche du CC17, résistant à la gentamicine. Ces résultats soulignent l’importance d’une approche intégrée combinant surveillance épidémiologique, génomique et clinique permettant de mieux anticiper l’évolution du SGB dans un contexte de pressions sélectives croissantes.
Nous avons ensuite étudié le rôle des cellules M intestinales, situées au niveau des plaques de Peyer de l’intestin, comme porte d’entrée potentielle du SGB. Nos résultats suggèrent que le clone CC17 est capable d’induire la maturation des cellules M probablement via l’activation de voies inflammatoires, en réponse à des produits bactériens solubles. Certaines molécules bactériennes comme la β-hémolysine/cytolysine ou les lipoprotéines pourraient être impliquées dans le processus de maturation. Ces données illustrent les interactions des bactéries commensales avec l’épithélium intestinal et le rôle du microbiote dans le développement et la maturation de l’intestin néonatal.
Nous avons également montré que le SGB CC17 interagit avec les intégrines α5β1 et αVβ6 à la surface des cellules M via la protéine de surface Srr2, et exploite une voie de transcytose dépendante des galectines pour traverser les cellules M. Ces observations ouvrent la voie à l’étude de nouvelles stratégies thérapeutiques ou préventives ciblant ces interactions. Des approches in vivo chez la souris et le développement d’un modèle d’organoïde intestinal humain différencié en cellules M permettront de mieux caractériser ces mécanismes dans un contexte physiologique.
Mots clés :
Streptococcus agalactiae, infections néonatales invasives, CC17, épidémiologie, cellules M intestinales, maturation cellulaire, transcytose, intégrines, galectines.