Persistance du VIH-1 : caractérisation moléculaire au niveau sanguin et tissulaire, sous traitement antirétroviral

Gilbert Mchantaf

02 juillet 2025

Thèse

Infos pratiques

14h - 23h
Salle Rosalind Franklin
Professionnels de la recherche et médecins
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Sous la direction de Véronique Avettand-Fenoël et Antoine Cheret

Résumé :

Persistance du VIH-1 : caractérisation moléculaire au niveau sanguin et tissulaire, sous traitement antirétroviral 

Le Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH-1) intègre son génome sous forme d’ADN dans le génome cellulaire et établit des réservoirs qui persistent au cours de l’infection malgré les traitements antirétroviraux (TAR). Ce réservoir constitue le principal obstacle à l’éradication virale.

Alors qu’il a été montré que le TAR initié précocement permet une décroissance plus importante de l’ADN VIH-1 total que le TAR initié au stade chronique, l’impact du TAR précoce sur la dynamique d’ADN VIH intégré, la forme la plus stable, est mal connu. Nous avons ainsi réalisé une étude rétrospective pour décrire la cinétique de l’ADN VIH intégré selon le moment d’initiation du TAR. Nous avons inclus 41 participants, diagnostiqués en primo-infection et traités au stade chronique (cohorte ANRS PRIMO) et 92 participants diagnostiqués et traités en primo-infection (essai ANRS Optiprim-2). Nous avons quantifié l’ADN VIH total et l’ADN VIH intégré sur les échantillons de sang prélevés au moment de la primo-infection, de l’initiation du traitement et 1 à 2 ans après. Nous avons montré que le TAR initié précocement limite le stock d’ADN VIH intégré dans les cellules immunitaires. Ces résultats valident le modèle proposé précédemment par notre équipe (Trémeaux et al., 2019). En revanche, le TAR tardif a très peu d’impact sur cette forme. Nous montrons l’intérêt du TAR précoce pour sélectionner les bons candidats pour les futures stratégies de rémission (Mchantaf et al., 2023).

L’ADN VIH persistant peut archiver des mutations de résistance (DRM) au TAR. Or certaines études ont rapporté un recyclage possible d’antirétroviraux malgré des DRM décrites sur les formes circulantes lors d’échecs thérapeutiques antérieurs. La seconde partie de mon travail s’est donc intéressée à l’éventuelle persistance de ces DRM dans le réservoir et à l’intégrité des provirus portant ces mutations. Nous avons ainsi étudié rétrospectivement le cas de : i) 6 personnes en succès thérapeutique sous Cabotegravir/Rilpivirine (CAB/RPV) avec antécédent d’échec virologique à un agent de la classe et ii) 1 en échec thérapeutique sous cette combinaison. Nous avons caractérisé les provirus archivés sur du sang prélevé avant l’initiation de CAB/RPV (séquençage du génome complet en dilution limite) et analysé l’intégrité des provirus portant des DRMs. Nous avons aussi séquencé les gènes RT et IN (approche amplicon). Des DRM à CAB/RPV ont été retrouvées chez 4 personnes en succès thérapeutique. La majorité était présente sur des provirus minoritaires (<20%) et défectifs. Seule H221Y, conférant une résistance à la RPV, a été retrouvée sur des provirus intacts à une faible charge mutationnelle. Nos résultats soulignent l’intérêt d’évaluer l’intégrité des provirus pour interpréter les génotypages de résistance sur ADN (Mchantaf et al., 2024).

La majorité des réservoirs se situe dans les tissus profonds. Dans la troisième partie, j’ai donc exploré les ganglions lymphatiques, les PBMC, le tissu adipeux, le sperme et le rectum de 20 personnes en succès thérapeutique sous traitement à base de dolutégravir (étude ANRS DOLUVOIR). Nous avons étudié le niveau d’ADN VIH, de transcrits VIH, et la présence éventuelle de DRM. Les niveaux d’infection et de transcription étaient les plus élevés dans les ganglions. Certaines DRM ont été retrouvées dans certains tissus, soit portées par des génomes défectifs (hypermutés) soit non associées à une résistance majeure au dolutégravir. Nos résultats montrent que la persistance d’une transcription virale au niveau des réservoirs profonds n’est pas associée à la sélection de DRM au dolutégravir.

La persistance du VIH dépend du moment d’initiation du TAR. L’étude des réservoirs est complexe (aspect dynamique, sang/tissus, provirus intact/défectif). Le caractère défectif d’un grand nombre de provirus invite à revisiter la notion d’impact des DRM archivées sur la réponse au traitement.

Mots clés : réservoir du VIH-1,  ADN VIH-1 intégré,  traitement précoce,  résistance au traitement antirétroviral,  génotypage de résistance sur ADN VIH-1,  séquençage génome complet,  persistance virale,  génome défectif,  dolutégravir,  réservoirs tissulaires