HUSH, l’arme à double tranchant pour faire taire le VIH

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Double effet de HUSH pour réprimer le VIH : histoire d’une rencontre entre épigénétique et métabolisme de l’ARN

Roy Matkovic et ses collègues du groupe de Florence Margottin-Goguet (Equipe Margottin-Goguet/Pique, Institut Cochin) en collaboration avec les équipes de Stéphane Emiliani (Institut Cochin), Gael Cristofari (Université Côte d'Azur, IRCAN, Nice) et Maike Hansen (Radboud University, Pays-Bas) ont mis en lumière un nouveau mécanisme de répression de l’expression du virus VIH. Ce mécanisme est basé sur l’activité du complexe HUSH, un complexe qui, non seulement propage des marques épigénétiques répressives, mais aussi, agit au niveau post-transcriptionnel en dégradant l’ARN nouvellement synthétisé.

Ce travail vient d’être publié dans Nature communications. Il a été possible grâce aux soutiens financiers de SIDACTION et de l’ANRS-MIE.

L’objectif de l’équipe de Florence Margottin-Goguet est de caractériser comment les cellules de l’organisme combattent les virus, en particulier les virus responsables du SIDA (VIH-1 et VIH-2) et, en retour, de comprendre comment les virus contournent les défenses cellulaires.

Ainsi, l’équipe a mis en lumière la bataille moléculaire entre le complexe cellulaire HUSH et certaines protéines virales. D’une part, le complexe HUSH, réprime l’expression du virus, une fois son génome intégré dans le génome des cellules : HUSH, acronyme anglais qui signifie « CHUT » en français, rend donc le virus silencieux ! D’autre part, l’équipe a montré que HUSH était dégradé par la protéine Vpx du virus VIH-2 (et d’autres protéines de virus divergents), suggérant que HUSH est un obstacle important pour le virus (1,2).

Dans son manuscrit récent (3), l’équipe met en lumière un nouveau mécanisme de répression de l’expression des gènes grâce à son étude de l’effet de HUSH vis-à-vis du VIH. HUSH est un complexe composé de trois protéines, TASOR, MPP8 et periphilin. L’équipe a découvert que TASOR était présent au niveau de sites de transcription actifs, c’est à dire là où l’ARN viral est synthétisé, et lie l’ARN polymérase II en cours d’élongation, c’est-à-dire en cours de synthèse de nouveaux transcrits viraux. HUSH, à l’origine identifié en tant que complexe propageant des marques épigénétiques répressives sur les gènes, pourrait dont effectuer ce rôle épigénétique en se déplaçant avec l’ARN polymérase II. De plus, l’équipe a montré que TASOR liait les ARNs naissants, et recrutait des facteurs de dégradation des ARN, notamment CNOT1, protéine chaperone du complexe CCR4-NOT qui intervient dans la suppression de la queue polyA des ARN messagers (dé-adénylation). TASOR et CNOT1 forment une plateforme principale qui permet le recrutement de facteurs épigénétiques et de protéines du métabolisme des ARN pour éteindre l’expression du virus. Le modèle proposé pour la première fois dans les cellules humaines rappelle les modèle RITS et Piwi-Asterix-Panoramix-Eggless, identifiés respectivement chez la levure et la drosophile.

Aujourd’hui, le virus VIH n’est toujours pas éradiqué. Chez les patients sous thérapie antirétrovirale, il persiste dans des cellules dîtes « réservoirs », enfoui dans le génome des cellules infectés, prêt à se multiplier à nouveau si le traitement est interrompu. Un défi majeur consiste à développer des stratégies pour éliminer de l’organisme ces virus silencieux. L’équipe se demande dans quelle mesure HUSH est impliqué dans la persistance du virus chez les patients et si cibler HUSH pourrait représenter une option pour le développement de molécules antivirales visant les réservoirs.

Légende

Les complexes RITS (S. Pombe), Piwi-Asterix-Panoramix (D. melanogaster) et HUSH humain agissent selon des mécanismes de répression épigénétique très similaires, suggérant une forme de conservation au cours de l’évolution. Dans ces trois situations, la répression repose sur la reconnaissance de l’ARN d’un rétro élément en cours de synthèse et le recrutement d’une enzyme de méthylation des histones afin de propager des marques épigénétiques H3K9me3 sur la chromatine de l’élément intégré. Il s’ensuit une compaction de la chromatine et une inhibition de la transcription. Le complexe HUSH humain et RITS chez la levure induisent également la dégradation co-transcriptionnelle de l’ARN synthétisé grâce au recrutement de facteurs de déstabilisation des ARNs comme CNOT1. Une partie de la Figure provient de l’article de Nature communications (3).

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