Sous la direction de Florence Margottin-Goguet, équipe Rétrovirus, infection et latence
Résumé
Malgré l'efficacité des thérapies antirétrovirales, le virus de l'immunodéficience humaine (VIH), l'agent du SIDA, reste un problème majeur de santé publique dans le monde. En effet, le traitement n'est pas curatif en raison de la persistance de l'ADN proviral intégré dans le génome de l'hôte à l'état latent. Le complexe HUSH (composé de TASOR, MPP8 et périphiline) réprime l'expression du VIH1 à partir de son promoteur en induisant à la fois la propagation des marques épigénétiques répressives et la dégradation du transcrit. Cette activité de HUSH est contrecarrée par certaines lignées lentivirales. Ainsi, Vpx du VIH-2, l'un des deux virus VIH, ou Vpr de lentivirus simiens (SIV), inactivent HUSH par dégradation protéasomale, ce qui induit une augmentation de l'expression virale. Ces données mettent en évidence un rôle essentiel de HUSH dans la bataille moléculaire entre le virus et son hôte. En 2017, il est apparu que la protéine MORC2 (Microrchidia family CW-type zing finger 2) jouait un rôle critique dans la répression épigénétique des gènes cellulaires par HUSH. MORC2 est une protéine de remodelage de la chromatine incriminée dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth et dans plusieurs cancers. Le but de ma thèse a été de déterminer si MORC2 intervenait dans le cycle de vie du VIH-1 et du VIH-2 en coopération ou non avec le complexe HUSH. Nos résultats mettent en évidence que MORC2 est (i) une protéine cellulaire impliquée dans un conflit génétique au cours de l'évolution des primates en raison de la présence de sites sous sélection positive, et (ii) une protéine antivirale réprimant le VIH dans deux modèles de latence du VIH-1 (les lignées lymphocytaires J-Lat A1 et des jurkats infectées de façon latente par un virus dérivé de VIH-1). Alors que Vpx du VIH-2 induit la dégradation de HUSH, la protéine virale entraîne une augmentation du niveau d’expression de MORC2. Cette augmentation pourrait avoir une pertinence biologique, comme celle de compenser la dégradation de HUSH par Vpx. Nous montrons également que MORC2 est essentielle à HUSH (et vice-versa) pour réprimer un virus entrant lors de l'infection. Néanmoins, une fois l'ADN proviral intégré dans le génome de l'hôte, MORC2 semble capable de maintenir la répression seule sans HUSH. De plus, l’activité antivirale de MORC2 opère à deux niveaux : transcriptionnel et également posttranscriptionnel par coopération avec le complexe CCR4-NOT. En conclusion, nos données permettent de proposer que MORC2 est un nouveau facteur de restriction du VIH, fonctionnant à la fois avec et sans HUSH. Nous spéculons également que MORC2 pourrait servir de gardien de l’immunité intrinsèque en maintenant la répression du virus suite à l'inactivation de HUSH par Vpx et, de façon plus générale, de gardien de l'intégrité génomique lors de différents types de stress.