Exploration du contrôle de la réplication du VIH dans deux études : rôle du facteur de restriction HUSH in vivo, et impact de l’instauration précoce de différentes trithérapies sur le compartiment génital.

Alice-Andrée Mariaggi

22 novembre 2022

Thèse

Infos pratiques

14:00 -
Salle Rosalind Franklin
Professionnels de la recherche et médecins
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Thèse réalisée sous la direction de Véronique Avettand-Fenoel équipe Rétrovirus, infection et latence

Résumé

Les antirétroviraux disponibles pour le traitement de l’infection à VIH permettent de contrôler la réplication virale mais, même instaurés précocement, ne permettent pas d’éliminer le réservoir viral. La compréhension des mécanismes contrôlant la réplication virale est un enjeu majeur pour le développement de nouvelles stratégies thérapeutiques. Nous nous sommes intéressés au contrôle de la réplication du VIH in vivo dans deux contextes différents : d’une part le rôle éventuel du facteur de restriction HUSH dans le contrôle de la transcription virale chez des sujets infectés et d’autre part la cinétique de réplication virale et du nombre de cellules infectées dans le compartiment génital chez des hommes recevant une trithérapie soit à base d’inhibiteur d’intégrase, soit à base d’inhibiteur de protéase, dès la primo-infection.

Le complexe HUSH a été récemment identifié comme un facteur de restriction cellulaire intervenant dans la répression épigénétique de la transcription du génome cellulaire et du génome de rétrovirus, dans des modèles de latence virale in vitro. Dans ce contexte, nous avons développé une étude soutenue par l’ANRS pour déterminer le rôle de HUSH in vivo dans le contrôle de la réplication du VIH chez 44 sujets infectés par le VIH-1 ou le VIH-2, en primo-infection ou au stade chronique et non traités. L’activité de HUSH a été évaluée par la quantité de transcrits de sept cibles cellulaires potentielles décrites dans la littérature dans des modèles cellulaires HeLa, KBM7 ou HEK293T. Aucune étude n’a à ce jour étudié l’impact de HUSH dans des lymphocytes T CD4 primaires. Cette activité a été comparée à différents marqueurs viraux reflétant la transcription et la réplication virale chez ces patients. Notre étude suggère une corrélation entre le niveau de transcription des gènes ZNF225 et ZNF350, cibles potentielles de HUSH, et le niveau de transcription du VIH. Pour comprendre la variabilité des résultats observés in vivo pour les sept gènes cellulaires étudiés, nous avons cherché si ces gènes étaient ciblés par HUSH dans des lymphocytes T CD4 primaires par une approche gène candidat puis par une approche plus large avec la réalisation d’un RNA-Seq en collaboration avec le groupe de F Margottin-Goguet. Les différents résultats de la littérature et des analyses sur cellules CD4 primaires indiquent que HUSH impacte des cibles cellulaires différentes selon le type cellulaire considéré.

La seconde partie de mon travail concerne l’étude de la décroissance de la réplication virale et du nombre de cellules infectées dans le sperme, à l’instauration de deux trithérapies dès la primo-infection, période critique au niveau individuel avec un pic de réplication virale, une chute des lymphocytes T CD4, la constitution du réservoir viral ; et au niveau collectif en raison du fort risque de transmission sexuelle liée aux niveaux élevés de virions et cellules infectées dans le sperme. Le Dolutegravir (DTG), inhibiteur d’intégrase de 2ème génération, a récemment été recommandé dans cette indication. Nous avons réalisé une étude portant sur le compartiment génital dans le cadre de l’essai randomisé multicentrique ANRS169 OPTIPRIM2 qui comparait l’impact sur le niveau d’ADN VIH sanguin d’une trithérapie à base de DTG vs une trithérapie à base de darunavir (DRV : inhibiteur de protéase). Nos résultats indiquent que les particules virales et les cellules infectées ne sont plus détectées dans le sperme à 48 semaines de traitement dans 80% des cas de traitement précoce à base de DTG instauré en médiane 20 jours après les premiers signes cliniques de primo-infection. Cela n’est pas différent du traitement à base de DRV (Mariaggi et coll. JAC 2022). Néanmoins, les charges virales étant élevées dans le sperme dans les premières semaines qui suivent la contamination un allègement de traitement ne devrait pas être envisagé trop précocement.

Nous avons évalué l’impact du complexe HUSH in vivo sur la réplication virale. Des études complémentaires sont nécessaires pour comprendre la diversité des résultats obtenus en fonction des modèles et des cibles cellulaires de HUSH. Par ailleurs, les charges virales élevées dans le sperme en primo infection soulignent la nécessité d’évaluer les nouvelles stratégies thérapeutiques dans le compartiment génital pour limiter la transmission de l’infection.

Mots clefs : Contrôle de la réplication virale, Facteurs de restriction, complexe HUSH ; Compartiment génital ; Réservoirs VIH, primo-infection VIH ; Dolutégravir