Le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) est responsable de l’une des plus vastes pandémies virales contemporaines. 40 ans après sa découverte, l’un des obstacles majeurs à la guérison des personnes vivant avec le VIH réside dans la persistance de réservoirs de cellules infectées de façon latente. Ces cellules échappent à l’action des molécules antirétrovirales actuelles et abritent au sein de leur génome des copies virales silencieuses capables de se réactiver pour produire de nouveaux virus infectieux. Actuellement, un des objectifs principaux de la recherche sur le VIH est de mieux comprendre les mécanismes moléculaires qui gouvernent la mise sous silence du VIH dans les cellules infectées de façon latente pour cibler efficacement ces réservoirs.
Dans ces cellules, l’expression du virus est bloquée dès l’étape de la transcription de l’ADN viral intégré (nommé provirus) qui est assurée par la machinerie cellulaire associée à l’ARN polymérase II (ARNPII). Lorsqu'elle n'est pas levée efficacement, la pause proximale de l'ARNPII au niveau du promoteur viral peut conduire à la terminaison prématurée de la transcription du provirus, contribuant ainsi au maintien sous silence de son expression. C’est dans ce contexte que les auteurs ont révélé le rôle clé d’un nouveau complexe de terminaison dans la répression transcriptionnelle du VIH-1 au sein de cellules infectées de façon latente.
L’objectif de l’étude était d’identifier de nouveaux déterminants moléculaires impliqués dans la terminaison prématurée de la transcription du VIH-1. Les scientifiques ont donc analysé les fonctions de plus d’une dizaine de facteurs de terminaison dans un modèle cellulaire permettant de mesurer l’activité transcriptionnelle du promoteur viral. A partir de ce crible initial, une seule protéine clé, PCF11, a été identifiée pour son rôle majeur dans la répression transcriptionnelle du virus.
Ensuite, en recherchant les partenaires moléculaires de PCF11, les auteurs ont découvert son interaction avec WDR82, une protéine associée à l’ARNPII dont le rôle en tant que facteur de terminaison non-canonique commence à être élucidé à l’échelle du transcriptome cellulaire.
Ils ont donc décrypté le rôle de ce nouveau complexe protéique dans la répression transcriptionnelle du VIH-1. L’étude de l’interaction de PCF11 et WRD82 avec la chromatine montre qu’ils sont recrutés de manière interdépendante au niveau d’une région proximale située en aval du site de démarrage de la transcription. L’analyse précise de l’expression du provirus à l’échelle de l’ARN révèle que PCF11 et WDR82 agissent de concert pour forcer l’arrêt prématuré de la transcription du provirus dans les cellules infectées de façon latente.
Ces travaux ont ainsi permis d’identifier que le complexe de terminaison PCF11-WDR82 est au cœur d’un nouveau mécanisme insoupçonné de mise sous silence du VIH-1. Cibler ces facteurs de terminaison dans le cadre de nouvelles stratégies thérapeutiques pourrait permettre de purger les réservoirs en vue d’une guérison libre de traitement.
Légende de la figure : Dans les cellules latentes, PCF11 réprime la transcription du promoteur du VIH-1 en coopérant avec WDR82 au niveau de la région proximale du promoteur viral. Le recrutement de PCF11-WDR82 par l’ARN polymerase II (RNAPII) pourrait stimuler sa dissociation de l’ADN et favoriser la terminaison prématurée de la transcription.
En savoir plus
Ait Said M, Bejjani F, Abdouni A, Ségéral E, Emiliani S. Premature transcription termination complex proteins PCF11 and WDR82 silence HIV-1 expression in latently infected cells. Proc Natl Acad Sci U S A. 2023 Dec 5;120(49):e2313356120. doi: 10.1073/pnas.2313356120. PMID: 38015843; PMCID: PMC10710072.