Le vieillissement est un processus complexe qui affecte de nombreux aspects de la biologie des mammifères, y compris le système immunitaire. En effet, les altérations du système immunitaire liées à l'âge rendent les personnes âgées plus sensibles aux maladies infectieuses et aux tumeurs, ce qui entraîne une augmentation de la morbidité et de la mortalité. En outre, la récente épidémie de SARS-coV-2 a rappelé que l'efficacité de la vaccination est considérablement réduite dans la population âgée, ce qui limite l'efficacité de la prophylaxie préventive. Il est donc crucial de comprendre l'impact du vieillissement sur le système immunitaire.
Les facteurs de transcription de la famille Foxo jouent un rôle crucial dans divers processus biologiques, tels que le métabolisme, la quiescence, la survie cellulaire, la résistance au stress oxydatif, la différenciation cellulaire, l'autophagie et l'apoptose. Des études antérieures ont montré que des membres de la famille Foxo ralentissent le vieillissement chez divers organismes non apparentés phylogénétiquement, tels que Caenorhabditis elegans, Drosophila melanogaster ou encore Hydra vulgaris. Cependant, le rôle des protéines Foxo dans la longévité des mammifères et plus spécifiquement dans le vieillissement du système immunitaire n'a pas encore été exploré.
L'équipe de Bruno Lucas, en collaboration étroite avec les plateformes de l'Institut Cochin, a démontré que Foxo1 régule finement le vieillissement des lymphocytes T in vivo. Plus précisément, leurs résultats montrent que l'expression de Foxo1 est progressivement diminuée dans les cellules T de souris avec l'âge, ce qui conduit à une modification de leur signature transcriptionnelle. Cela entraîne plusieurs défauts du système immunitaire, notamment un épuisement accru des cellules T caractérisé par l'expression de récepteurs inhibiteurs et des déficiences fonctionnelles, ainsi qu'une perturbation de l'homéostasie des cellules T naïves conduisant à une augmentation du nombre de cellules T mémoires.
Les auteurs montrent également que l'augmentation des niveaux de cytokines inflammatoires avec l'âge, un phénomène connu sous le nom d'“inflammaging”, contribue à la diminution d’expression de Foxo1 et au vieillissement des cellules T. En particulier, ils identifient les interférons de type 1 comme des acteurs clés de la diminution d’expression de Foxo1 et du vieillissement associé des cellules T.
Le récepteur des interférons de type 1 et le facteur de transcription Foxo1 sont tous deux exprimés par la plupart des types cellulaires chez les mammifères. Il est intéressant de noter qu’une diminution d’expression de Foxo1 avec l'âge a été documentée, chez l’homme, dans le cerveau, les muscles, le cartilage articulaire, les disques intervertébraux et le ménisque. Dans la plupart des cas, l'ampleur de cette diminution a été corrélée à des pathologies telles que la dégénérescence des neurones ou des disques intervertébraux, l'arthrose ou l'échec de la régénération musculaire. Ainsi, l'axe “interférons de type 1-Foxo1” pourrait être impliqué dans le vieillissement chez les mammifères bien au-delà du système immunitaire.
Ce travail a été soutenu par une subvention de la Fondation pour la Recherche Médicale (Equipe FRM numéro EQU202103012662).
En savoir plus
Aurélie Durand, Nelly Bonilla, Théo Level, Zoé Ginestet, Amélie Lombès, Vincent Guichard, Mathieu Germain, Sébastien Jacques, Franck Letourneur, Marcio Do Cruzeiro, Carmen Marchiol, Gilles Renault, Morgane Le Gall, Céline Charvet, Agnès Le Bon, Bruno Martin, Cédric Auffray and Bruno Lucas. Type 1 interferons and Foxo1 down-regulation play a key role in age-related T-cell exhaustion in mice. Nature Communications, 15:1718 (2024). doi.org/10.1038/s41467-024-45984-8