Identification d’une mutation dans le gène GNA13 responsable de défauts de pigmentation cutanée

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Une étude menée par l’équipe de Jérôme Delon et Paolo Pierobon, en collaboration avec des cliniciens et des dermatologues français, a identifié une mutation récurrente dans le gène GNA13 codant pour la protéine Gα13 chez des patients atteints de troubles rares du développement, visibles sur la peau sous la forme d'une hypopigmentation linéaire, généralement appelée « hypomélanose d'Ito ». L’originalité de cette étude est d’avoir élucidé le mécanisme moléculaire reliant un défaut de fonctionnement de Gα13 à une pathologie cutanée. Les résultats de cette recherche sont détaillés dans un article paru dans la revue Nature Communications.  

Résumé de l'article

Gα13 fait partie d'un complexe hétérotrimérique (αβγ) associé aux récepteurs couplés aux protéines G (RCPG). Lors de la stimulation d’un RCPG, la sous-unité Gα se charge en GTP et active RHOA, qui se charge à son tour en GTP et interagit avec divers effecteurs pour réguler des fonctions cellulaires essentielles telles que la dynamique et l'organisation du cytosquelette, la polarité, le trafic, la migration et la prolifération cellulaire. Dans des mélanocytes, nos résultats ont montré que la mutation R200K crée une forme constitutivement active de Gα13, indépendamment de l'engagement d’un RCPG, et déclenche des changements de morphologies et de fonctions cellulaires. Elle entraîne une polymérisation accrue de l'actine et des niveaux plus élevés de chaînes légères de myosine phosphorylées (MLC) qui renforcent la contractilité cellulaire. Ces effets combinés provoquent un arrondissement des mélanocytes. Nous avons retracé ces changements cellulaires à l'hyperactivation de RHOA et de son effecteur ROCK, grâce à l'utilisation d'inhibiteurs spécifiques qui ont pu inverser les changements morphologiques des cellules. La mutation R200K dans Gα13 affecte également le facteur de transcription YAP, provoquant sa translocation nucléaire et son activité accrue pour déclencher la transcription du gène ARPC5, impliqué dans la polymérisation de l'actine. Ces changements significatifs dans la signalisation et la morphologie cellulaires ont fortement altéré la migration et l'adhésion des cellules, alors que la prolifération cellulaire est restée inchangée. De plus, en utilisant des expériences de co-cultures mélanocytes-kératinocytes, nous avons découvert que les mélanocytes mutants ne peuvent pas transférer efficacement la mélanine aux kératinocytes environnants, expliquant le défaut de pigmentation observé chez les patients.

Ainsi, nos résultats soulignent l'importance de Gα13 et de RHOA dans le développement humain et leur rôle dans la mélanogénèse. Grâce à nos expériences montrant qu’il est possible d’inverser les défauts cellulaires déclenchés par cette mutation récurrente grâce à l’utilisation ciblée d’inhibiteurs pharmacologiques, ce travail offre des perspectives thérapeutiques pour ces patients.

 

En savoir plus

El Masri R, Iannuzzo A, Kuentz P, Tacine R, Vincent M, Barbarot S, Morice-Picard F, Boralevi F, Oillarburu N, Mazereeuw-Hautier J, Duffourd Y, Faivre L, Sorlin A, Vabres P, Delon J. A postzygotic GNA13 variant upregulates the RHOA/ROCK pathway and alters melanocyte function in a mosaic skin hypopigmentation syndrome. Nature Communications. 2025 Feb 18;16(1):1751. doi: 10.1038/s41467-025-56995-4. PMID: 39966435; PMCID: PMC11836271.

Figure : a. Zone cutanée hypopigmentée chez un patient muté dans le gène GNA13. b. Images d'immunofluorescence de Gα13 WT et R200K (vert) exprimées dans des cellules mélanocytaires B16-F0, marquées pour les filaments d’actine (rouge). La barre d'échelle est de 10 µm. c. Schéma de signalisation montrant les effets de la mutation Gα13 R200K sur l'activation de la voie RHOA/ROCK/MLC et la translocation nucléaire de YAP/TAZ.

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